Pertes d’exploitation : la Haute Cour de Justice de Londres se prononce en faveur des assurés
Les tribunaux de commerce français ont rendu des décisions isolées au sujet de l’application de la garantie Perte d’exploitation, allant certes dans le sens des assurés pour la plupart mais non encore définitives.
Outre-manche, la Haute Cour de Justice de Londres a pris une position globale sur les contrats et a retenu une interprétation au bénéfice des assurés. Le Cabinet LOYER AVOCATS décrypte les enseignements à en retirer.
L’autorité de contrôle britannique, la Financial Conduct Authority (FCA) - l’équivalent de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) - a saisi la Haute Cour afin qu’elle se prononce sur l’interprétation et l’application des clauses des contrats de huit compagnies d’assurance en matière de pertes d’exploitation. La FCA avait estimé que le refus d’indemnisation des assureurs n’était pas justifié au regard de la formulation des clauses de garantie.
Le 15 septembre 2020, la juridiction a rendu sa décision. Elle retient, pour la majorité des clauses analysées, une application en faveur des assurés dès lors qu’elle a estimé que les termes employés étaient sujets à interprétation.
Pour certaines d’entre elles, un parallèle avec le droit applicable sur le territoire français peut être retenu.
Tel est le cas concernant la notion de voisinage qui a pu être interprétée très largement par la Haute Cour de Justice de Londres, essentiellement sur les clauses ne précisant pas le périmètre d’apparition de la maladie et formulées de manière très larges. Elle a ainsi pu décider que cette notion pouvait englober la totalité du territoire britannique et non seulement les alentours proches des locaux de l’entreprise concernée.
Une des clauses analysées par la Haute Cour met en avant le fait que, en cas d’extension de garantie intégrant le risque de maladie, une exclusion portant sur les pertes ou dommages dus à une épidémie ne peut que vider de sa substance la garantie octroyée. La juridiction retient que l’exclusion ne peut effectivement pas jouer dans la mesure où elle exclut ce qui a été expressément couvert par l’extension de garantie. En d’autres termes, la Haute Cour de Justice de Londres aurait fait application des articles 1170 du Code civil et L. 113-1 alinéa 1 du Code des Assurances si elle avait dû statuer en droit français.
Elle applique le principe « contra proferentem » selon lequel, en cas de d’ambiguïté, les clauses d’un contrat s’interprètent de préférence contre celui qui les a proposées. Cela n’est pas sans rappeler l’application en droit français du principe de l’interprétation in favorem prévu à l’article L.1331-2 du Code de la consommation selon lequel en cas de doute, les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels s’interprètent dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel.
Ainsi chacun des contrats litigieux en matière de pertes d’exploitation devra être interprété à la lumière du jugement rendu. Notons cependant que la décision n’est pour autant pas définitive au regard de la possibilité qu’ont les assureurs de faire appel auprès de la Cour Suprême. Affaire à suivre donc.
Article rédigé par Aurélie LAISSAC, élève-avocate en stage au Cabinet LOYER AVOCATS
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