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COVID- 19 : Assiste t'on à une crise dans le secteur des assurances ?

Le 14 avril 2020
COVID- 19 : Assiste t'on à une crise dans le secteur des assurances ?

Lors de son allocution télévisée le 13 avril 2020, Monsieur le Président Emmanuel MACRON a précisé qu'il serait attentif à la participation du secteur assurantiel à la crise actuelle :

"(...) les assureurs doivent aussi être au rendez-vous de cette mobilisation économique. J'y serai attentif".

Les assureurs font l'objet de vives critiques depuis le début de la crise sanitaire, qui va inexorablement entraîner une crise financière en raison du confinement et des fermetures des établissements recevant du public afin de limiter la propagation du virus COVID-19.

Pourtant les assureurs s'investissent pour soutenir la crise actuelle. Alors, comment expliquer les critiques formulées à l'encontre des assureurs ? Et ces critiques sont-elles justifiées ?

Dans un communiqué du 23 mars, les membres de la FFA se sont engagés à contribuer à hauteur de 200 millions d’euros au Fonds de solidarité mis en place par les pouvoirs publics en faveur des TPE et des indépendants, des secteurs particulièrement touchés par les conséquences économiques, financières et sociales du virus covid-19. Dans un entretien au Figaro le 13 avril 2020, la Présidente de la FFA a annoncé le versement de la part de ses membres de la somme de 200 M€ s'ajoutant aux premiers 200 M€, au Fonds de solidarité. Est également en réflexion la mise en place d'un fonds d'investissement pour soutenir les PME et les ETI.

La sinistralité supplémentaire pour le secteur Santé/Prévoyance a été évaluée à 1,3 Md€.

Les mutuelles d'assurances soutiennent financièrement les associations investies auprès des personnes en difficulté dans cette période difficile (Argus Assurances du 01/04/2020).

La MAIF a annoncé qu'elle allait redistribuer 100 M€ à ses sociétaires, correspondant à l'économie réalisée suite à la baisse de la sinistralité automobile.

Le groupe de protection sociale MALAKOFF HUMANIS met en place un dispositif spécifique de "solidarité entreprise COVID-19" dont une aide financière d'urgence à certaines entreprises et établissements.

Monsieur Thomas Buberl (AXA) s'est prononcé favorablement à la création d'un régime d'assurances liées aux pandémies (Interview du 05 avril 2020 au JDD). Ce régime serait inspiré de ce qui se fait en matière de catastrophes naturelles, avec une participation financière de l'Etat et des assureurs.

Dès lors, pourquoi les assureurs sont-ils critiqués ?

Il y a eu tout d'abord un refus catégorique d'appliquer les garanties pertes d'exploitation au motif, non justifié juridiquement, del'inassurabilité du risque pandémique.

Dans le cadre d’une interview accordée à l’Argus Assurance le 30 mars 2020, Madame Valérie FAURE-MUNTIAN, députée LREM, qui préside le groupe d’études assurances à l’Assemblée nationale, avait précisé que le système assurantiel actuel ne pouvait pas assumer, avec les cotisations appelées, faire face à une prise en charge de ce risque systémique.

Sur le site internet, la FFA avait indiqué pour sa part que la quasi-totalité des contrats couvrant les entreprises (pertes d’exploitation, rupture de la chaîne d’approvisionnement, annulation d’événements, défaut de livraison, etc.) excluait l’événement d’épidémie tout en précisant qu'il convenait pour chacun des assurés de se reporter à son contrat et de contacter son assureur.

Dans un article du 16 mars 2020, intitulé « Coronavirus et assurance », Monsieur le Professeur Luc MAYAUX, directeur de l'Institut des assurances de LYON, a conclu à l’assurabilité de l'épidémie, en précisant d’une part, que les risques liés à l’épidémie étaient assurables mais qu’ils n’étaient qu’imparfaitement garantis, et d’autre part que les effets sur l’assurance étaient relativement faibles.

Les assurés ont ainsi eu le sentiment d'une désinformation à ce sujet de la part des assureurs.

Ensuite, l'aide financière n'est pas arrivée spontanément. Il a fallu que l'Etat et les entreprises françaises interpellent les assureurs à ce titre.

Le manque d'anticipation est également aux cœurs des critiques. Une réflexion sur l'avenir est certes nécessaire, mais il aurait fallu que les contrats d'assurances prévoient déjà, au moins pour les plus gros assureurs, une perte d'exploitation sans dommage matériel couvrant le risque pandémique. Le secteur assurantiel réfléchit sur ces questions depuis quelques années déjà. En 2016, Madame Brigitte BOUQUOT, Présidente de l’AMRAE, avait déclaré que « l’ensemble des nouveaux risques qu’ils soient pandémiques, climatiques ou géopolitiques sont caractérisés par le fait que leurs impacts sont immatériels » (L’Argus Assurance, 2016). 

Enfin si la participation des assureurs au Fonds de solidarité n'est pas une mesure qui est jugée suffisante pour les français, c'est parce que les conditions d'application de ces mesures de solidarité sont fixées par l'Etat selon des critères très stricts, et que l'aide est nécessairement limitée dans son montant. Cette aide sera insuffisante pour que les entreprises puissent redémarrer leurs activités sereinement à compter du 11 mai prochain. Certains secteurs seront durablement touchés, notamment parce qu'ils ne sont pas concernés par le déconfinement prévue le 11 mai.

En définitive, il est donc indéniable que la participation des assureurs n'est pas négligeable, mais elle est jugée tardive et insuffisante aux yeux des assurés.